L’extension de la ville de Paris, protégée par un nouveau rempart à partir de 1356, fait perdre au Louvre sa fonction originelle de forteresse et son rôle de bastion avancé de défense. Un événement décisif consacrera sa vocation de résidence royale. Le 22 février 1358, Étienne Marcel, prévôt des marchands de Paris, à la tête d’une révolte contre le pouvoir en place, pénètre avec ses troupes dans la chambre du dauphin, au palais royal de la Cité (actuelle Conciergerie). Régent du royaume pendant la captivité à Londres de son père Jean le Bon et futur Charles V, le dauphin voit alors ses conseillers massacrés sous ses yeux et réussit à s’enfuir. Lorsqu’il rentre à Paris en 1359, il abandonne le palais de la Cité aux magistrats et fait transformer la forteresse du Louvre en un château de plaisance répondant à ses goûts fastueux.

Dès 1360, une armée de maçons, sous les ordres du premier maître d’œuvre dont le nom nous soit connu, Raymond du Temple, s’affaire à l’adaptation du Louvre en résidence royale. En dix ans, de nouveaux corps de logis percés de nombreuses baies et coiffés de hauts toits d’ardoise à double pente, des tours et des tourelles couvertes de poivrières ornées d’épis dorés, de girouettes et de banderoles, de hautes et multiples cheminées dépassant du promenoir crénelé métamorphosent littéralement l’austère forteresse. Louis Hautecœur, historien d’art, parlait de « joyeux et pittoresque hérissement ». L’ancienne tour de la Fauconnerie devient la tour de la Librairie, aménagée pour recevoir les 917 manuscrits de Charles V, dit le roi Très Sage : murs lambrissés de bois d’Irlande, voûte garnie de bois de cyprès, repoussant les insectes, fenêtres tendues de treillis contre d’indésirables oiseaux. À l’ouest du château, écuries et basse-cour, maréchaussée et conciergerie jouxtent les services de table du roi. Au nord s’étend le Grand Jardin, flanqué d’une ménagerie d’animaux sauvages. Rosiers, violettes, sauge, lavande, persil, sarriette, laitues, fraisiers veillés par des lions !