Qui était Aimé Césaire ?
Sur sa tombe, près de Fort-de-France, sont inscrits ses mots du Calendrier lagunaire :
« La pression atmosphérique ou plutôt l'historique
Agrandit démesurément mes maux
Même si elle rend somptueux certains de mes mots »
Dates clés
- 1913 : naissance à Basse-Pointe, en Martinique
- 1931 : arrivée à Paris pour ses études
- 1939 : de retour en Martinique, il est professeurs au lycée Schoelcher
- 1944 : séjour de six mois en Haïti
- 1945 : début de se carrière politique
- 2008 : mort à Fort-de-France, en Martinique
Un « grand poète noir »
En 1947, André Breton préface la réédition Cahier d'un retour au pays natal et reconnaît en Césaire un « grand poète noir ». Ce poème en vers libres, de 65 pages, rédigé en 1938-1939, est un long cri de révolte et d’éveil, un récit invocatoire, appelant le peuple noir à se réapproprier son passé et réinventer sa destinée. André Breton veut reconnaître en Aimé Césaire un frère dans le surréalisme, misant sur la capacité magique de la parole à créer et recréer le monde.
En Afrique et aux Amériques, Césaire est considéré comme une des voix majeures de la littérature francophone et postcoloniale. Sa poésie est enseignée dans les grandes universités du monde entier.
Son combat pour les peuples noirs
La dénonciation du colonialisme et l’engagement dans la cause noire sont deux combats intimement liés chez Aimé Césaire. Ils traversent son œuvre poétique et sont le moteur de sa carrière politique malgré les nécessaires compromis de l’exercice du pouvoir. Ses essais, articles et discours forment la passerelle entre les deux vocations d’Aimé Césaire, poète et homme politique.
La dénonciation du colonialisme
La dénonciation du colonialisme est présente dès son premier article dans L’Etudiant noir en 1935 et se poursuit dans les revues Tropiques et puis Présence africaine. Ses interventions aux deux Congrès des Écrivains et Artistes Noirs, à Paris en 1956 (Culture et colonisation), puis à Rome en 1959 (L’Homme de cultureet ses responsabilités) placent la culture au cœur du combat dans un XXe siècle traversé par les mouvements de décolonisation.
Son Discours sur le colonialisme, publié en 1951, est un pamphlet et reste une référence dans l’histoire des idées du XXe siècle. Césaire y place en exergue : « Le colonialisme, cette honte du XXe siècle », la phrase de Jacques Duclos, l’un des dirigeants du Parti communiste français.
Extraits
- « Je parle de millions d’hommes à qui on a inculqué savamment la peur, le complexe d’infériorité, le tremblement, l’agenouillement, le désespoir, le larbinisme »
- « Je dis que de la colonisation à la civilisation, la distance est infinie ; que, de toutes les expéditions coloniales accumulées, de tous les statuts coloniaux élaborés, de toutes les circulaires ministérielles expédiées, on ne saurait réussir une seule valeur humaine. »
Publié en 1961, l’essai sur Toussaint Louverture, héros de l’indépendance haïtienne, étudie les rapports entre la Révolution française et l'aspiration à la liberté dans les colonies antillaises, renouvelant l’analyse historique des sociétés coloniales. Toussaint Louverture, ancien esclave noir affranchi, devenu général porté par la Révolution française de 1789, proclame son intention de fonder la première république noire et meurt interné en France en 1803.
L’engagement dans la cause noire
La seconde moitié du XXe siècle est traversée par les mouvements d’émancipation des peuples noirs de la tutelle blanche : la fin de la ségrégation aux Etats-Unis avec la figure de Martin Luther King dans les années 1960, la fin de l’apartheid en Afrique du Sud avec le héros national, Nelson Mandela, dans les années 1990.
Dans cette perspective historique, Aimé Césaire, père fondateur de la négritude et pourfendeur du colonialisme, peut apparaître comme un frère d’armes. En 1947, il participe à la création de la revue Présence africaine, dont le premier numéro paraît en 1947 et qui existe toujours comme « revue culturelle du monde noire ».
Son fondateur, l’intellectuel sénégalais Alioune Diop, déclare la revue ouverte « à la collaboration de tous les hommes de bonne volonté (Blancs, Jaunes ou Noirs), susceptibles de nous aider à définir l'originalité africaine et de hâter son insertion dans le monde moderne ». Les soutiens sont nombreux, provenant d’intellectuels, écrivains et hommes engagés, parmi lesquels Albert Camus, André Gide, Jean-Paul Sartre, Théodore Monod.





