C'est quoi le surtourisme ?
Selon l’Organisation mondiale du tourisme (OMT), le surtourisme (ou overtourism in english) désigne un phénomène de saturation des sites touristiques par un nombre croissant de visiteurs. En d'autres termes, il y a trop de gens qui partent en vacances aux mêmes endroits et ça pose problème. À cette définition, Robert Bellini (responsable du pôle adaptation au changement climatique à l’ADEME) ajoute une dimension écologique :
« Le surtourisme implique aussi des impacts négatifs sur l’environnement en général : quand la nature n’est plus capable d’auto-réguler l’impact des activités touristiques humaines, avec de nombreuses conséquences comme la disparition d’espèces vivantes, une dégradation des sols, etc. »
Quels sont les impacts du surtourisme sur l’environnement ?
On entend beaucoup parler de l’impact du surtourisme sur le patrimoine culturel (certains sites historiques se dégradent plus vite car trop fréquentés) ou la qualité de vie locale (hausse du prix de l’immobilier, gentrification* des villes, etc), mais c’est surtout sur l’environnement que le tourisme de masse a des effets négatifs. Par exemple via :
- La surconsommation des ressources naturelles
Le tourisme augmente les besoins en énergie, en nourriture et en eau dans des zones bien définies. Et parfois, ces dernières n’en ont déjà pas beaucoup à disposition. - La création de déchets plastique supplémentaires
52 % des détritus jetés en mer Méditerranée seraient liés au tourisme balnéaire selon un rapport du WWF. - La pollution de l’eau et des sols qui nuit à la biodiversité
Des substances chimiques comme celles contenues dans les crèmes solaires sont rejetées dans les eaux usées. Certains endroits où seulement quelques centaines d’habitants vivent à l’année doivent faire face à des milliers de touristes sur une courte période d’été et une grande partie de leurs équipements ne sont pas adaptés. - La destruction des écosystèmes et la disparition de certaines espèces
La bétonisation des côtes, la déforestation et parfois même la surfréquentation de touristes peut suffire. Par exemple, la célèbre plage de Maya Bay en Thaïlande (où Danny Boyle a tourné le film La Plage) a été fermée aux touristes pendant 3 ans pour permettre aux récifs coralliens de se reformer et empêcher l’érosion de la baie. - La pollution de l’air
Le tourisme serait à l’origine de 8 % des émissions de gaz à effet de serre mondiales (qui elles-mêmes sont responsables du changement climatique). Cette pollution vient de tout ce qui est consommé par les touristes sur place (nourriture, hébergement, shopping), mais surtout par les transports.
Effets directs, indirects et induits du surtourisme : quelle est la différence ?
Les effets directs
Ce sont tout simplement tous les types de pollution que le surtourisme engendre sur un lieu de vacances, dans une zone et une période bien définies.- Les effets induits
Ils concernent également le lieu de vacances qui subit le surtourisme, mais avec un ressenti différent. Par exemple : l’augmentation de du prix de l’immobilier, la multiplication de logements Airbnb et la gentrification vont pousser les populations locales à vivre plus loin, en périphérie des villes. La plupart d’entre elles doivent prendre leur voiture pour aller au travail, ce qui augmente les émissions de CO2 dans l’atmosphère. - Les effets indirects
Ils ne concernent pas forcément les lieux en proie au surtourisme. Par exemple, les week-ends de grand départ en vacances, les embouteillages vont générer des pics de pollution importants et dégrader la qualité de l’air dans plusieurs villes de France.
Quelles solutions pour limiter le surtourisme en France ?
Promouvoir un tourisme plus vertueux
De plus en plus d’initiatives sont mises en place pour proposer un tourisme « alternatif ». Incitation au covoiturage, bons plans pour voyager en train, séjours bas-carbone… les offres ne manquent pas ! Attention toutefois au greenwashing, mais pour Robert Bellini, « ces offres sont importantes car elles permettent de créer un nouvel imaginaire collectif autour du tourisme. On montre aux gens que se déplacer de manière éco-responsable et voyager différemment c’est possible ».
Mieux réguler le tourisme
Le 18 juin 2023, le gouvernement français a dévoilé un plan afin de mieux réguler les flux touristiques et accompagner les collectivités locales qui connaissent des pics de fréquentation. Dans les grandes lignes, ce plan prévoit :
- D’encourager un tourisme mieux réparti dans le temps et sur le territoire.
- De promouvoir des destinations moins connues et d’alerter sur les risques de surfréquentation d’un lieu.
- De créer un observatoire national des sites touristiques majeurs afin de mesurer les flux touristiques et leurs impacts.
Pouvoir donner plus de moyens aux collectivités pour mieux gérer les flux de touristes et créer une stratégie compatible avec le futur climatique qui nous attend, serait une bonne chose. « Pour ça, il faut actionner 3 leviers en même temps » explique Robert Bellini :
- Le territoire : pour son rôle de gestion des flux et de préservation du patrimoine territorial.
- La population : pour repenser le tourisme au XXIe siècle et modifier l’imaginaire collectif.
- Les professionnels du secteur du tourisme : pour proposer des offres plus éco-responsables, des circuits alternatifs et densifier le tourisme en le répartissant mieux sur l’année.
Si malgré tout, le surtourisme continue, des quotas de visiteurs, la création de taxes ou l'interdiction totale ou partielle d’accès à des sites pourraient être mises en place (c’est déjà le cas par exemple pour certaines calanques marseillaises, accessibles uniquement sur réservation pendant les mois d’été).
Sources
Interview de Robert Bellini, responsable du pôle adaptation au changement climatique à l’ADEME et de Sixtine Fischer, chargée de mission tourisme à l’ADEME
ADEME - Tourisme durable : 20 mesures pour une transition de la 1ère destination touristique mondiale
ADEME - Les tutos de l’Ademe, vive les vacances !
Nature Climate Change - The carbon footprint of global tourism
Vie Publique - Le surtourisme : quel impact sur les villes et sur l'environnement ?
Le Monde - Le surtourisme, un défi pour la France
WWF - La mer Méditerranée : une richesse unique en déclin rapide
* Gentrification : processus par lequel la population d'un quartier populaire se fait progressivement remplacer par une couche sociale plus aisée.





