L'histoire de la lutte contre la ségrégation raciale aux États-Unis

La lutte des Afros-Américains fut longue pour obtenir l’égalité des droits. Le mouvement des droits civiques va permettre l’inscription de l’égalité des droits dans la loi et la fin de la ségrégation.


Publié le 19/12/2012 • Modifié le 18/08/2025

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La population noire, présente sur le sol américain avant même la naissance des États-Unis en 1776, a dû attendre la seconde moitié du XIXe siècle pour sortir de sa condition d’esclavage. En 1896, l’arrêt de la Cour suprême des États-Unis Plessy v. Ferguson légitime la législation raciste par la doctrine separate but equal (« séparés mais égaux »). Mais il fallut attendre le mouvement des droits civiques, entre 1955 et 1968, qui va permettre l’inscription de l’égalité des droits dans la loi et la fin de la ségrégation. Salué jusqu’au-delà des frontières comme une victoire pour les droits humains fondamentaux, ce mouvement est profondément ancré dans l’histoire américaine.

De l'esclavage au mouvement des droits civiques

  • 4 juillet 1776 : Adoption de la Déclaration d'indépendance : naissance des États-Unis d’Amérique.

  • 1861-1865 : Guerre de Sécession, conduisant à l’abolition de l’esclavage.

    Quand les ex-colonies britanniques prennent leur indépendance et créent les États-Unis d’Amérique, la question de l'esclavage devient vite un point de fracture entre les États du Sud et ceux du Nord. Pour les premiers, l’esclavage est considéré comme la solution au besoin de main-d’œuvre dans la culture du coton et participe à l’établissement d’un mode de vie sudiste, bien éloigné de celui du nord plus industriel. Sur cette fracture, dans un pays où le gouvernement fédéral a ses pouvoirs limités par ceux des États qui le constituent, éclate la guerre de Sécession en 1861 : 11 États du sud font sécession des États-Unis dont le président nouvellement élu, Abraham Lincoln, républicain et nordiste, est un partisan de l’abolition de l’esclavage. L’Union, constituée des États du Nord et frontaliers, en sort vainqueur en 1865. Trois amendements à la Constitution américaine, dits amendements de la Reconstruction, sont adoptés pour sortir les Noirs de leur condition :
    ♦ abolition de l’esclavage (13e amendement)
    ♦ reconnaissance de la citoyenneté et égale protection de la loi (14amendement)
    ♦ droit de vote à tout citoyen américain (15amendement)

  • 1865 : Création du Ku Klux Klan (KKK), organisation clandestine prônant la suprématie blanche.
    Créé dans le Sud au lendemain de la guerre de Sécession en 1865, le Klan avait pour objectif premier la lutte contre les Noirs qui venaient d’être émancipés. Il est dissous officiellement en 1869, mais connaît un nouvel essor après la Première Guerre mondiale, cristallisant toutes les inquiétudes de la vieille Amérique. De raciste, il devient aussi antimarxiste, xénophobe et réactionnaire. Mis en liquidation en 1944, il renait de ses cendres une nouvelle fois pour combattre la déségrégation des années 1950-1960. Depuis, il tente de renaître régulièrement, trouvant de nouveaux ennemis (les homosexuels, les immigrants illégaux, …), sans réussir à dépasser le stade de groupuscules.

  • 1877 : Mise en place de lois nationales et locales issues des Black Codes imposant la ségrégation raciale aux États-Unis.
    A la suite d’un marchandage politique à la Présidentielle, les dernières troupes fédérales se retirent des États du Sud. Dès lors, ceux-ci adoptent des législations défavorables aux Afro-Américains, les Black Codes, et des lois ségrégationnistes imposant la séparation des races dans nombre de domaines de la vie quotidienne (bus, restaurants, écoles, etc.), baptisées lois « Jim Crow », du nom d’un spectacle avec des acteurs blancs grimés. La Cour Suprême les légitime en arguant que la Constitution interdit la discrimination de la part des États mais non les actes individuels de discrimination. 

  • 1896 : L’arrêt de la Cour suprême Plessy v. Ferguson légitime la législation raciste par la doctrine separate but equal  (« séparés mais égaux »).

  • 1909 : Création de la NAACP, la National Association for the Advancement of Colored People, association nationale pour l'avancement des gens de couleur.

  • 1914 : Marcus Gravey lance son mouvement nationaliste noir.

  • 1930 : Création de la NOI (Nation of Islam), organisation noire radicale se revendiquant d’une forme d’islamisme sans grand rapport avec les fondements de la religion musulmane.

  • 1947 : Jackie Robinson, premier Noir à jouer en Ligue majeure de baseball.

La conquête des droits civiques

  • 1954 : L’arrêt de la Cour suprême Brown v. Board of Education déclare anti-constitutionnelle la ségrégation raciale dans les écoles publiques.
    Le mouvement des droits civiques est lancé.

  • 1er décembre 1955 : Arrestation de Rosa Parks et début du boycott des bus de Montgomery (Alabama).
    A Montgomery, dans l'Alabama, une couturière noire, Rosa Parks, est arrêtée et condamnée pour avoir refusé de céder sa place à un Blanc dans l'autobus. Emue, la population noire réagit et lance, sous l'impulsion de Martin Luther King, le mouvement de boycott des bus : pendant un peu plus d'un an, elle circule à pied ou met en place ses propres moyens de transport.

  • 1957 : Création de la SCLC, la Southern Christian Leadership Conference, luttant pour les droits civiques dans un esprit de non-violence chrétienne, présidée par Martin Luther King.

  • 1957-1959 : À Little Rock (Arkansas), violente crise conduisant à l’abolition de la ségrégation dans les écoles.

  • 1960 : Premiers sit-in à Greensboro (Caroline du Nord), action de protestation non-violente, qui s’étendra à travers tous les États-Unis et des premiers freedom rides, voyages dans des bus inter-États pour la déségrégation dans les transports. Les actions non-violentes se succèdent et prennent diverses formes :  occupations pacifiques (sit-in) dans les lieux interdits aux Noirs, voyages dans les bus pour défier les ségrégationnistes (Freedom ride), mouvement pour favoriser l’inscription des Noirs sur les listes électorales (Freedom summer)...

  • 1961 : Décret du président John F. Kennedy instaurant l’affirmative action (discrimination positive) pour lutter contre les discriminations raciales à l’embauche.

  • 1963 : 28 août, la marche sur Washington pour les droits civiques réunit entre 200 000 et 300 000 personnes, Martin Luther King y fait son discours I Have a Dream.
    Premier hot summer (émeute raciale). Violences meurtrières à Birmingham (Alabama) après la déségrégation effective de quatre écoles.

  • 1964 : Durant le Freedom Summer, campagne d'inscription électorale pour les Afro-Américains au Mississippi, meurtre de trois militants des droits civiques.
    2 juillet : Adoption duCivil Rights Act, signé par le président Lyndon B. Johnson. Toutes formes de ségrégation dans les lieux publics est illégales, que ce soit sur la race, la couleur, la religion, le sexe, ou l’origine.
    Malcom X crèe son propre mouvement nationaliste noir, the Muslim Mosque, Inc.

  • 1965 : Assassinat de Malcom X.
    Les marches de Selma à Montgomery (Alabama), une militante blanche est assassinée par le KKK.
    Hot summer de Watts (Los Angeles).
    Adoption du Voting Rights Act,supprimant les tests et taxes pour devenir électeur.
    Le président Johnson signe un décret sur l’Equal Opportunity Employment (égalité des chances dans l'emploi) visant les entreprises de travaux publics dans leur politique d’embauche.

  • 1966 : radicalisation du SNCC (Student Non violent Coordinating Committee) sous l’influence de son nouveau président, Stokeley Carmichael.
    Né en 1960 lors d'assemblées d’étudiants en Caroline du Nord, le SNCC rallie de nombreux jeunes supporters dans le Nord et lève des fonds pour appuyer les actions du mouvement des droits civiques dans le sud.

    Plutôt que de poursuivre des actions puissantes de désobéissance civile comme les marches ou les sit-ins, Carmichael revendique le Black Power lors de la marche contre la peur dans le Mississippi en 1966 : fini de répondre à la violence par la non-violence, rejetées les valeurs de la société américaine, « le peuple noir de ce pays doit s’unir, reconnaitre son héritage et bâtir sa communauté ».
    L’expression Black Power (le « Pouvoir Noir ») a émergé lors du mouvement des droits civiques, comme une affirmation de l’identité noire, préalable à toute éventuelle intégration à une société dominée par le « pouvoir blanc ». Le Black Power n’est pas un mouvement structuré mais un concept auquel se rattachent de nombreux mouvements radicaux, comme la NOI (Nation of Islam) ou le Black Panther Party.

  • 1967 : L’arrêt de la Cour suprême Loving v. Virginia, déclare anti-constitutionnelle l'interdiction des mariages mixtes.

  • 4 avril 1968 : Assassinat de Martin Luther King, suivi d’émeutes à Chicago, Baltimore et Washington.

L'héritage des droits civiques aux États-Unis

A partir de la fin des années 1960, le mouvement des droits civiques et sa revendication de droits égaux pour les Afro-Américains, inspire d’autres mouvements pour l’égalité des droits : les hispaniques constituent le Chicano Movement, les Amérindiens l’American Indian Movement etobtiennent le vote de l'Indian Civil Rights Act en 1968. A la suite des émeutes de Stonewall dans le quartier de Greenwhich Village à New York, en 1969, le Gay Liberation Front se constitue.

Les apports du mouvement dans la société américaine sont durables : dans la perception du racisme et l’image négative de son exposition publique, dans les tactiques employées par les mouvements sociaux et les groupes militants (sit-ins, testings, etc.). L’essentiel du mouvement est sans doute, en imposant la transformation durable du statut des Noirs américains dans la société, d’avoir réconcilié les États-Unis avec son histoire et son idéal. L’acte de naissance du pays proclame que « tous les hommes sont créés égaux », mais les Noirs qui forment à l’époque 40 % de la population des États du Sud sont maintenus en esclavage jusqu’à leur émancipation après la guerre de Sécession.

La ségrégation sera le combat suivant, gagné par le mouvement des droits civiques : les Noirs et les Blancs ne sont plus « séparés mais égaux », mais tous des citoyens à part entière et égaux. John Lewis, l’un des voyageurs de la liberté tabassés par la foule à Montgomery en 1961, est depuis 1987 un élu de la Géorgie siégeant à la Chambre des représentants des États-Unis. Denise McNair est l’une des fillettes qui a trouvé la mort lors de l’attentat à la bombe contre le temple baptiste de Birmingham en 1963 : en 2005 son amie Condoleezza Rice est la première femme noire à accéder au poste de secrétaire d’État (ministre des affaires étrangères).

En novembre 2008, le fils d’un homme noir originaire du Kenya et d’une femme blanche originaire du Kansas, Barack Obama, est élu président des Etats-Unis. Sa victoire (renouvelée en novembre 2012) symbolise le chemin parcouru par les Etats-Unis. Comme il l’a déclaré au soir de son élection en 2008 :

« S’il y a encore quelqu’un ici qui doute que l’Amérique soit un endroit où tout est possible, qui se demande encore si le rêve de nos fondateurs est toujours vivant, qui s’interroge encore sur la puissance de notre démocratie ; ce soir vous apporte la réponse. »
Barack Obama


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