La France face à la sécheresse
Petit point sur la situation : la sécheresse de l’été 2022 était historique. Elle a en plus été suivie d’un hiver beaucoup plus sec que d’habitude, on parle de « sécheresse hivernale ». Plus tard, les quelques épisodes de pluie du printemps ont contribué à humidifier les sols, notamment dans la partie nord de la France mais ça n’a pas suffi pour compenser. Par conséquent, les niveaux des nappes phréatiques sont bas, comme ceux des rivières. C’est une situation qui va s’accentuer avec le changement climatique : les épisodes de sécheresse vont devenir plus fréquents et plus intenses. C’est pour ça qu’il faut faire attention aux ressources en eau et à leur rôle ! Aujourd’hui en France, voici la répartition entre les usages :
Mais alors concrètement, économiser l’eau, ça veut dire quoi ? On t’explique 👇
Économiser l’eau à l’échelle collective
« Depuis 2000, l’Union européenne a mis en place la directive cadre sur l’eau pour préserver cette ressource : à la fois l’économiser en termes de quantité et la préserver en termes de qualité » explique Nina Graveline, économiste agricole et de l'eau à l’INRAE. Cependant, en parallèle les pouvoirs publics continuent d’inciter les agriculteurs à irriguer leurs cultures en les soutenant avec des aides publiques par exemple. Il est donc facile de s’y perdre. Pourtant, il y a de vraies actions à mettre en place pour économiser l’eau à l’échelle collective ! Une des solutions à court terme, déjà appliquée en France par exemple, c’est de mettre en place des restrictions (par exemple, interdiction d’arroser les jardins, réduction des prélèvements agricoles, etc). Mais il y a aussi des choses à mettre en place sur le long terme.
► Économiser l’eau du côté de l’agriculture
L’agriculture est le secteur qui consomme le plus d’eau, c’est donc normal de se demander comment mieux faire en la matière. Voici quelques pistes :
- Travailler sur les réseaux d’eau, c’est-à-dire éviter les fuites au maximum !
- Changer de technologie d’irrigation pour passer à des méthodes au goutte-à-goutte qui sont plus économes.
- Mieux piloter l’irrigation, ce qui signifie arroser au bon moment pour que ce soit le plus efficace possible.
- Développer des filières agricoles qui ont besoin de moins d’eau. Cela peut être en choisissant d’autres types de culture ou en réduisant sur l’élevage.
Ce sont toutes de belles pistes, mais Nina met en garde : souvent, quand on économise de l’eau dans le secteur agricole, elle n’est pas juste « rendue » aux écosystèmes et à la nature. La quantité qui a été économisée sur une parcelle de terrain est utilisée pour irriguer une plus grande surface qu’auparavant. D’après elle, pour que ce soit efficace il faut donc au minimum contrôler où vont ces économies.
► Économiser l’eau dans le secteur de l’industrie
L’industrie aussi consomme de l’eau notamment celle du tourisme et de l’agroalimentaire. En mars 2023, le gouvernement a annoncé dans son « Plan eau » présenté que « 50 sites industriels avec le plus fort potentiel de réduction » seraient accompagnés dans leurs démarches. À ce niveau-là, les mesures à prendre peuvent aussi consister à réduire les fuites le plus possible. Une autre solution est de réutiliser l’eau, de fonctionner presque en circuit fermé.
Mieux mesurer et planifier les usages de l’eau
Aujourd’hui, « la connaissance de qui prélève, combien et pourquoi n’est pas complète » explique Nina. Il vaut donc mieux mesurer ce qu’on prélève, à quoi cela va servir, et ensuite choisir pour quelle activité on va l’utiliser, ce qui demande de grandes concertations, de la pédagogie et du compromis 🤝 Elle ajoute : « C’est un bien commun donc la décision de “à qui on donne l’eau” doit être une décision à laquelle tout le monde pourrait participer. Par exemple, est-ce qu’il vaut mieux utiliser l’eau pour de la viticulture qui est destinée à être exportée, ou bien pour faire pousser des légumes qui seront consommés sur le territoire ? »
D’autres idées pour économiser l’eau ?
Bien sûr il y a encore d’autres façons de faire, comme :
- Valoriser, c'est-à-dire réutiliser d’une manière ou d’une autre, les eaux non conventionnelles. À savoir les eaux usées, les eaux récupérées à la sortie des gouttières, les eaux issues de processus industriels…
- Améliorer le stockage dans les sols et les nappes en faisant en sorte qu’ils soient en meilleure santé (donc des sols avec plus de vie dedans, donc avec moins de pesticides qui nuisent à cette vie…).
- Faire plus de sensibilisation et d’éducation, à la fois dans les écoles, pour le grand public et chez les professionnels pour que tout le monde s’y mette.
Économiser l’eau à ton échelle : les bons gestes à adopter
Pour Nina, il faudrait surtout que les technologies accompagnent les gens pour faire ces économies. Par exemple développer les réseaux d’eau non conventionnelle et rénover le réseau de canalisation pour éviter les fuites (comme dit plus haut). Mais ça n’empêche pas qu’il faut faire attention à sa consommation personnelle : « certaines personnes consomment le double d’autres personnes, explique Nina ». Et pour ça, on a quelques astuces.
- Vérifier et réparer les fuites : les fuites sur les canalisations peuvent avoir lieu dans les secteurs agricoles et industriels mais aussi chez toi. Ce que tu peux faire à ton échelle, c’est vérifier le compteur d’eau avant d’aller dormir ou le matin avant de partir. Si le lendemain matin ou en revenant le soir, le chiffre a bougé, c’est qu’il y a une fuite et qu’il faut chercher à la réparer.
- Installer un mousseur sur les robinets : un mousseur mélange de l’air à l’eau pour réduire le débit de sortie mais pas la pression. Tu peux économiser jusqu’à 50 % sur un robinet ! Tu peux en trouver facilement en magasin de bricolage.
- Il y a plein d’autres petits gestes à mettre en place dans ta cuisine ou ta salle de bain : bien remplir la machine à laver et le lave-vaisselle, choisir les programmes « éco » (souvent plus longs, mais qui consomment moins), éviter les pré-lavages, prendre des douches (courtes) puisque 4 minutes de douche plutôt qu’un bain c’est 110 litres économisés à chaque fois !
- Manger moins de viande (surtout de bœuf) : beaucoup d’études montrent que les produits animaux ont une grosse « empreinte eau », même si les chiffres exacts varient selon la méthode (15 000 litres par kg de bœuf selon la méthodologie Water footprint contre 550 à 700 L selon l’INRAE).
Les économies d’eau côté jardin
Si tu as la chance d’avoir un jardin (ou même un balcon), tu peux par exemple :
- Installer un récupérateur d’eau de pluie
- Installer un goutte-à-goutte pour arroser, ce qui peut faire économiser jusqu’à 50% !
- Planter des plantes qui n’ont pas besoin de beaucoup d’eau.
Sources
Interview de Nina Graveline, économiste agricole et de l'eau à l’INRAE
BRGM - Nappes d’eaux souterraines au 1er juin 2023
Gouvernement - Préservons notre ressource en eau
Eau France
Gouvernement - Les 53 mesures du plan eau





