Madame Jourdain la raisonnable, dans « Le Bourgeois gentilhomme »

De toutes les femmes de l’œuvre de Molière, Madame Jourdain est sans doute la plus raisonnable. Son mari, Monsieur Jourdain, est un bourgeois qui se ridiculise à force de vouloir devenir gentilhomme. C’est-à-dire, appartenir à la noblesse de cour.

Madame Jourdain, une femme clairvoyante et raisonnable

Madame Jourdain apparaît dans cette comédie-ballet après qu’ont défilé plusieurs professeurs qui enseignent à Monsieur Jourdain la musique, la danse, l’escrime ou la philosophie :

« Ah, ah ! Voici une nouvelle histoire. Qu'est-ce que c'est donc, mon mari, que cet équipage-là ? Vous moquez-vous du monde, de vous être fait enharnacher de la sorte ? Et avez-vous envie qu'on se raille partout de vous ?

…

Et pour moi, je suis scandalisée de la vie que vous menez. Je ne sais plus ce qu’est notre maison : on dirait qu'il est céans carême-prenant tous les jours ; et dès le matin, on y entend des vacarmes de chanteurs et de violons, dont tout le voisinage se trouve incommodé. »

Madame Jourdain réprimande son mari qu’elle voit perdre la tête et dépenser sans compter ! Il paie ses professeurs mais prête aussi beaucoup d’argent à Dorante. Dorante est un comte ruiné qui fait croire à Monsieur Jourdain qu’il pourrait devenir l’amant d’une marquise… une femme que lui-même tente de séduire. Madame Jourdain voit clair dans le jeu de Dorante :

« Cet homme-là fait de vous une vache à lait.

…

C'est un vrai enjôleux.

…

Il vous sucera jusqu'au dernier sou. »

Madame Jourdain, bourgeoise et fière de l’être

C’est avec malice que Madame Jourdain tente de sortir son mari de cette situation aberrante… en vain ! Elle comprend alors qu’il voudrait que leur fille épouse Dorante, afin qu’elle devienne noble. Madame Jourdain s’énerve :

« C'est une chose, moi, où je ne consentirai point. Les alliances avec plus grand que soi sont sujettes toujours à de fâcheux inconvénients. Et je ne veux point qu'un gendre puisse à ma fille reprocher ses parents, et qu'elle ait des enfants qui aient honte de m'appeler leur grand-maman. »

Madame Jourdain est un personnage fort. Elle n’est pas ridicule contrairement à son mari. Elle ne cherche pas à être aristocrate, ne fait preuve d’aucun mépris de classe, et veut que sa fille épouse un homme qu’elle aime. Lucide, elle sait que son mari pourrait la tromper et ne se laisse pas berner. Elle est drôle, ironique, elle s’amuse de ce qu’est son mari.

Madame Jourdain incarne l’ensemble des personnages féminins de Molière.

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