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Français06:56Publié le 20/11/2023

« Au jour le jour » de Sully Prudhomme

C'est la base : rap et poésie

Athéna Sol te donne les clés pour comprendre le Parnasse, ce courant poétique apparu dans la seconde moitié du XIXe siècle en opposition au romantisme.

« Au jour le jour » de Sully Prudhomme

La rappeuse Juste Shani interprète librement le poème de Sully Prudhomme (1839-1907) Au jour le jour, écrit en 1875.

Quand d'une perte irréparable
On garde au cœur le souvenir,
On est parfois si misérable
Qu'on délibère d'en finir.


La vie extérieure oppresse :
Son mobile et bruyant souci
Fatigue... et dans cette détresse
On murmure : « Que fais-je ici ? »


Libre de fuir tout ce tumulte
Où ma douleur n'a point de part,
Où le train du monde l'insulte,
Pourquoi retarder mon départ ?


« Pourquoi cette illogique attente ?
Les moyens sont prompts et divers,
Pour l'homme que le néant tente,
D'écarter du pied l'univers ! »


Mais l'habitude, lâche et forte,
Demande grâce au désespoir ;
On se condamne et l'on supporte
Un jour de plus sans le vouloir.


Ah ! C'est qu'il faut si peu de chose
Pour faire accepter chaque jour !
L'aube avec un bouton de rose
Nous intéresse à son retour.


La rose éclora tout à l'heure,
Et l'on attend qu'elle ait souri ;
Éclose, on attend qu'elle meure ;
Elle est morte, une autre a fleuri ;


On partait, mais une hirondelle
Descend et glisse au ras du sol,
Et l'œil ne s'est séparé d'elle
Qu'au ciel où s'est perdu son vol ;


On partait, mais tout près s'éveille,
Sous un battement d'éventail,
Un frais zéphire qui conseille
Avec l'espoir un dernier bail ;


On partait, mais le bruit tout proche
D'un marteau fidèle au labeur,
Sonnant comme un mâle reproche,
Fait rougir d'être un déserteur ;


Tout nous convie à ne pas clore
Notre destinée aujourd'hui ;
Le malheur même est doux encore,
Doux à soulager dans autrui :


Une larme veut qu'on demeure
Au moins le temps de l'essuyer ;
Tout ce qui rit, tout ce qui pleure,
Fait retourner le sablier.


Ainsi l'agonie a des trêves :
On ressaisit, au moindre appel,
Le fil ténu des heures brèves
Au seuil du mystère éternel.


On accorde à cette agonie
Que la main n'abrège jamais,
Une lenteur indéfinie
Où les adieux sont des délais ;


Et sans se résigner à vivre
Ni s'en aller avant son tour,
On laisse les moments se suivre,
Et le cœur battre au jour le jour.

Analyse du poème : sublimer la beauté de la vie

Le poème de Sully Prudhomme (premier lauréat du prix Nobel de littérature en 1901) s’inscrit parfaitement dans la poétique du Parnasse. Pas de cause à défendre, aucun engagement politique. Le lyrisme est également absent. D’ailleurs la première personne du singulier est presque inexistante : c'est le « on » qui domine. Le poète parle donc de tout le monde, des humains en général. Son poème a donc un caractère universel et non individuel.

  • Versification : la forme est très travaillée. Les quatrains sont composés d’octosyllabes parfaits avec des rimes ciselées puisqu’il y a qu’une seule rime pauvre, et que la plupart sont des rimes riches.
    ► Exemple : irréparable / misérable ; oppresse / détresse ; tumulte / insulte.
  • Sully Prudhomme n'a donc pas cherché la facilité.
  • Thèmes : le poète parle de notre rapport à la mort. Dans les quatre premières strophes, il expose une situation : face au désespoir provoqué par la perte d'un être cher par exemple (il parle d’une « perte irréparable »), il arrive qu’on puisse avoir envie de mettre fin à nos jours. Mais il n’en est rien grâce à la vie ! Sully Prudhomme évoque toutes les choses belles et poétiques qui nous retiennent ! Il fait intervenir la nature : « la rose », « l’hirondelle », « le vent ». Plus loin, il évoque aussi le travail de l’homme avec « le bruit du marteau ». Le mot « labeur » prend ici tout son sens. C’est l’éloge de la création humaine, de l’artifice, par opposition à la nature. Le travail devient une raison de vivre, il contribue à rendre la vie plus belle et à lui donner du sens.
  • Figures de style : les strophes 8, 9 et 10 sont construites autour d’une anaphore, c’est-à-dire que le même groupe de mots est répété en début de strophe « On partait, mais... ». Il faut comprendre « on s’apprêtait à quitter ce monde, mais… quelque chose nous retient » : la rose qui éclot, l’hirondelle qui vole, le vent (le zéphir) qui nous rafraîchit… Ce sont des choses simples mais belles, et rendues encore plus belles sous la plume du poète qui les décrit avec grâce.
    Enfin, même le malheur devient beau dans le poème. « Une larme veut qu’on demeure… le sablier ». La métaphore du sablier, pour exprimer le délai qu’on laisse à la mort, mais aussi notre volonté de continuer à vivre, fait du malheur un jalon de nos vies et le rend éminemment poétique.

Comme les quatrains du poème qui se succèdent les uns aux autres, les jours se suivent tout au long de notre vie.

 

Ce qu'il faut retenir de ce poème

  • La beauté de la forme : Sully Prudhomme évoque notre rapport à la mort, à la vie. Sa poésie très travaillée cherche à sublimer la beauté du quotidien (la nature, le travail, la création humaine...). Les quatrains sont composés d’octosyllabes et de rimes riches. Utilisation de figures de style (métaphore, anaphore...).
    ► La poésie du courant Parnasse est souvent très hermétique, difficile à comprendre : on privilégie le beau au détriment du sens.
  • Rupture avec les codes de l'écriture romantique : les auteurs du Parnasse rejettent la poésie romantique, son lyrisme, et l'engagement social et politique du poète.

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Réalisateur : Xavier Reim

Auteur : Clémence Losfeld et Athéna Sol

Producteur : Milgram

Année de copyright : 2023

Année de production : 2023

Année de diffusion : 2023

Publié le 20/11/23

Modifié le 01/03/24

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