Vivian Maier était-elle une espionne ?

Les clichés de Vivian Maier, une nounou américaine photographe autodidacte, n'ont été révélés au grand public qu'au moment de sa mort, en 2009. Sa fine observation de la société du XX^e siècle, soulève l'hypothèse de son statut d'espionne qu'elle a, elle-même, alimenté de son vivant. Décryptage avec Adèle Van Reeth.

La photographe Vivian Maier, « espionne » de la vie ordinaire

« Je suis une sorte d’espion ». Appareil-photo en bandoulière, Vivian Maier l'affirme à ses voisins qui l’interrogent sur les longues poses immobiles qu’elle prend dans des situations en apparence anodines. Ses photos créent une sorte d’irruption dans un univers avec lequel la nounou-photographe n’entre en contact que par son appareil, parfois même par l’intermédiaire d’un simple reflet dans un miroir. Certaines photos trahissent une irritation de la part des sujets qui ne l’ont pas vu venir et avec lesquels elle ne crée aucun dialogue. De ce point de vue, Vivian Maier, espionne, pourquoi pas ? Mais au service de quoi, ou de qui ?

Vivian Maier, photographe de rue

Le travail de Vivian Maier fut inconnu du public jusqu’à sa mort, en 2009. En regardant de près, on peut observer la manière dont elle parvient à se saisir des corps et des regards qui ne l’attendent pas, et qui préféreraient sans doute ne pas la voir. Tantôt reporter indélicat, tantôt manipulatrice consciente, Vivian Maier nous met face à ce que nous ne voulons pas voir : nous-mêmes. A travers son travail, elle nous tend un miroir au moment où l’on cherche à se fuir. Et elle ne s’exclue pas du lot : sa série d’autoportraits la révèle impénétrable, recouverte d’ombre, certes anonyme, mais refusant résolument d’apparaitre comme une victime. « Vous êtes ce que vous êtes », semble-t-elle nous dire, «... et tant pis si cela ne vous plaît pas ».

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