Pourquoi Picasso s’est-il mis à peindre en bleu ?

Pendant trois ans, de 1901 à 1904, une teinte s’impose sur les toiles de Pablo Picasso : le bleu. Pourquoi cette couleur ? Parce que le peintre espagnol a le blues. Décryptage des origines de la période bleue avec Adèle Van Reeth.

Période bleue : Picasso en deuil

En musique, la « note bleue », c’est une note jouée légèrement en-dessous du ton de la mélodie, et la mélodie mélancolique ainsi obtenue s’appelle… le blues.
Chez Picasso, le bleu n’est pas une note, mais une couleur qui semble envahir toutes les autres et répandre sur son œuvre un voile de tristesse. Quand Picasso décide de peindre en bleu, il est en deuil. Il vient de perdre un ami précieux, le peintre Carlos Casagemas qu’il a rencontré à Barcelone en 1900. Très vite, les deux amis décident d’installer leur atelier à Montmartre, où la vie nocturne bat son plein et où ils rencontrent la sublime Laure Gargallo, mieux connue sous le nom de Germaine, dont Casagemas tombe fou amoureux. Mais voilà : Germaine, elle, ne l’aime pas. Le 17 février 1901, Casagemas, désespéré, est sur le point de la tuer, quand, au dernier moment, il retourne l’arme contre lui-même et meurt sur le coup.

Prémices de la période rose

Hanté par ce drame, Picasso plonge son pinceau dans la matière bleue et commence à peindre, d’abord la tête de son ami, puis le portrait de Germaine à laquelle il n’est pas insensible. C’est le début de ce que les historiens de l’art appellent la période bleue. Dans son Autoportrait, peint en 1901, Picasso, n’a pas 20 ans, et il se peint en homme âgé, avec barbe et moustache, et surtout, tout bleu. À l’exception des lèvres dont la teinte rosée annonce qu’au blues et à la mélancolie succédera bientôt la douceur retrouvée et... la période rose.