L'inconscient

Kamel a oublié ses clés à l’intérieur de chez lui. Il appelle Léonard qui lui soutient que c’est un acte manqué, qu’inconsciemment il ne voulait pas rentrer chez lui à cause du climat familial du moment. Un acte « inconscient » est-il juste commis par erreur, ou révèle-t-il une part de nous à laquelle nous n’avons pas accès ?

L'inconscient, qu'est-ce que c'est ?

In-conscient, cela signifie d’abord non-conscient. En effet, chacun observe que certaines de nos perceptions n’accèdent pas à notre conscience ou en ressortent : les souvenirs oubliés par exemple. Les philosophes se sont demandé comment comprendre cette zone étrange de notre vie intérieure. Au XVIII^e, Gottfried Wilhelm Leibniz nomme cela les « petites perceptions ». Certaines sont si faibles qu’elles « ne franchissent pas le seuil de la conscience ».

La révolution freudienne

Mais Sigmund Freud va accomplir une véritable révolution en faisant le pari que l’inconscient ce n’est pas juste le non-conscient, mais une force à part entière, active à l’intérieur de nous sans qu'on s'en rende compte. « Le moi n’est pas maître en sa propre maison ». Dans cette maison de l’esprit, Freud imagine notre inconscient comme une grande antichambre, séparée du salon, qui représente la conscience, par une porte. Les tendances psychiques veulent entrer dans le salon mais un gardien les filtre et si l'une d'elle lui déplait, il lui interdit d’entrer. Ces pensées inavouables ou traumatisantes sont alors refoulées : elles restent dans l’inconscient sans accéder à notre conscience. Freud pense par là qu’une majeure partie de nos actes, pensées, désirs échappe à toute conscience effective, et que cet inconscient se manifeste de différentes façons : rêves, lapsus, actes manqués…
Mais si c’est inconscient, alors ça signifie que je suis déterminé dans mes actes et mes pensées par des forces qui m’échappent ? La notion de volonté libre est fortement menacée par cet inconscient qui a le pouvoir arbitraire du videur.

La théorie de Freud peut faire peur : la psychanalyse va susciter de nombreuses critiques ! Parmi elles, la philosophe Simone Weil reconnaît le principe du refoulement mais en souligne les dangers : « il ne faut pas dire, comme Freud, qu’on ne soit pas du tout responsable des choses qu’on refoule ; on a le devoir de les contrôler ». Il nous faut remettre la volonté au premier plan. C’est une conception volontariste de la pensée et du sujet. Si Kamel avait essayé de prendre du recul sur les conflits familiaux, peut-être qu’il n’aurait pas oublié ses clés à l’intérieur.

💡 Philosopher, c’est peut-être accepter qu’il y a des choses qui nous échappent ?

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