La drague

Pour draguer une personne, les applications et les sites de rencontre sont incontournables. Mais, comment ces outils numériques qui n’existaient pas avant, ont-ils changé les techniques de drague et les relations amoureuses ? Pour y répondre, Cyrus North reçoit Marie Bergström, sociologue, chercheuse d’origine suédoise à l’Institut d’études démographiques et spécialiste des rencontres en ligne.  

La drague numérique : révolution et conservatisme

Les applications et les sites de rencontre ont imposé un cadre à la rencontre. C’est un changement fondamental, car avant leur apparition, les lieux spécifiques à la rencontre amoureuse et sexuelle étaient quasi inexistants. Leurs apparitions ont changé le type de relation et l’ambiance de la rencontre. Ils ont mis aussi à défis nos représentations de l’amour.

Dans le même temps, les comportements sur ces plateformes de rencontre sont très normés et genrés : la femme attend que l’homme fasse le premier pas. En effet, sur ces sites seul 10 % des initiatives sont féminines en France. En Suède, c’est 20 %. Même phénomène chez les homosexuels et les lesbiennes : les femmes envoient moins de messages.

Ségrégation du public et séparation des sphères

En fonction des applications de rencontre, la population est différente. Cela s’explique par le fait que :

• les applications ciblent le public selon leur origine, leur religion, leur âge, leur niveau social, etc.
• les classes supérieures abandonnent une application de rencontre dès lors qu’elle se diffuse largement.

Les plateformes de rencontre tendent aussi à séparer les sphères. En effet, comme ces services ont facilité les rencontres, la drague se fait désormais presque uniquement sur les sites de rencontres. Conséquence : de plus en plus de personnes utilisent ces plateformes pour des relations éphémères, au point qu’il est désormais mal vu d’avoir des histoires sans lendemain dans la sphère professionnelle ou amicale.

La drague sur les sites de rencontre : les idées reçues

Une image mécanique de la rencontre virtuelle. Même s’ils sont largement diffusés, on pense que ces services cassent l’idée de hasard, de singularité et de magie de la rencontre. Des couples issus de ces plateformes préfèrent donner comme lieu de rencontre, le premier rendez-vous physique plutôt que la première rencontre virtuelle.

Les algorithmes choisissent des partenaires qui nous ressemblent. Oui et non. Les applications nous montrent des profils en priorité. Mais, selon Marie Bergström, si les rencontres issues de ces plateformes réunissent des gens semblables, c’est à cause des usagers.

Un petit groupe attire tous les contacts. Non. Une étude de Marie Bergström menée en partenariat avec des plateformes de rencontre, contredit l’existence d’un groupe d’ « happy few » (des privilégiés). Selon elle, le jugement de goût est lié au milieu social. Selon le groupe social, certaines personnes attirent plus que d’autres.

Où et comment draguer une personne aujourd’hui ?

Aujourd’hui, il est moins accepté de draguer ailleurs que sur les plateformes de rencontre. On estime qu’il y a un lieu dédié à cela. Donc, pour Marie Bergström, si on veut draguer quelqu’un, mieux vaut le faire sur les espaces prévus pour ça.

Pour Marie Bergström, il faut aussi avoir des attentes mesurées lorsqu’on utilise les applications et les sites de rencontre. En effet, beaucoup de gens éprouvent de la déception à l’égard de ces services lorsqu’ils n’y font pas de rencontres. Un lieu de célibataires ne signifie qu’on va faire des rencontres plus facilement qu’ailleurs, explique-t-elle.