Enfants du IIIe Reich : les métis traités comme les « déficients » de l'Allemagne

A la fin de la Deuxième Guerre mondiale, les enfants métis sont à leur tour mis au ban de la société allemande et envoyés de force, dans des foyers évangéliques. Ika Hügel-Marshall est l'un de ces enfants métis dont le gouvernement allemand a tenté de nier l'identité.  

Qui sont les cinq mille enfants métis de l’après-guerre ? 

Les enfants métis de l’après-guerre sont les bébés issus des relations entre les soldats afro-américains et les femmes allemandes. Ces enfants afro-allemands stigmatisés dès leur naissance, sont d’abord exclus par les Etats-Unis et ses lois ségrégationnistes, puis par l’Allemagne à qui la couleur de peau de ces enfants rappelle la défaite de 1945. 

Ika Hügel-Marshall, allemande et noire 

Aux Etats-Unis, un décret de l’état-major américain interdit les mariages interraciaux, car ils seraient contraires à l’intérêt du pays. Par exemple, lorsqu’un commandant apprend qu’un soldat noir va devenir père d’un enfant, le soldat est immédiatement détaché dans une autre compagnie ou renvoyé aux Etats-Unis. Ika est l'une des victimes de ce racisme institutionnel. Née en 1947, d'une mère blanche et d'un père noir, Ika grandit seule avec sa mère, dans une société allemande hostile aux enfants métis. « Nous, les enfants de soldats afro-américains, on détonnait dans le paysage. C’était une époque où ma mère et les mères dans sa situation se faisaient traiter de "putes à noirs".»  

Comment l'Allemagne isolait les enfants afro-allemands ? 

Le gouvernement allemand décide d’isoler ces enfants métis et de les cacher loin de la société. A 6 ans, Ika est conduite de force, dans un foyer évangélique habituellement réservé aux enfants déficients mentaux. Dans ce foyer où l’amour de son prochain prenait la forme de châtiments corporels et d’humiliations, Ika raconte les multiples séances d’exorcisme, pour la purifier de son « âme noire ». Après neuf ans de maltraitances psychologiques et physiques de la part des religieuses, Ika Hügel-Marshall est enfin autorisée à rentrer chez elle, à l’âge de quinze ans. 

Nier l’identité des enfants métis 

L’adolescente, rejetée par l’Allemagne et les Etats-Unis, entame une longue quête d’identité, afin de se reconstruire. En 1965, la jeune femme tente de retrouver son père, mais en vain, car sa lettre est retournée avec l’indication « adresse inexacte ». Plusieurs années plus tard, dans les années 1990, Ika âgée de 46 ans retrouve enfin son père, dans la banlieue de Chicago. Malheureusement, son père décède un an plus tard.